Aspects singuliers de la genèse de la théorie de l’information
Au cours des années 20, la notion d’information devient sous la plume de scientifiques aussi différents que Hartley, Lewis ou Fisher un véritable concept scientifique. En ce qui concerne le statisticien britannique, il est clair que des disciplines comme l’agronomie ou la génétique conditionnent à divers degrés ses théories statistiques. Toutefois, si à partir de la fin des années 40, une bonne partie des chercheurs impliqués dans le développement de la théorie de l’information s’intéressent à la biologie, cela s’explique davantage à la fois par la constitution du réseau de scientifiques lié au développement de cette théorie (voir le ‘groupe cybernétique’ auquel se réfère Heims)fn 1 et par quelques livres ou articles aux échos importants. Le livre de Schrödinger publié en 1944, Qu’est-ce que la vie ?, compte incontestablement parmi ce type d’ouvrages, même s’il ne participe pas à la genèse de la théorie de l’information. Ce livre, sous-titré pour l’édition française “ de la physique à la biologie ”, participe implicitement au mouvement épistémologique qui caractérise l’introduction de la théorie de l’information dans toute une série de champs du savoir : l’unification des sciences. Il en est explicitement question dès la préface rédigée par Schrödinger :
“ Nous avons hérité de nos ancêtres une invincible prédilection pour des connaissances unifiées et universelles. Le nom même donné aux institutions les plus éminentes du savoir nous rappelle que, dès l’antiquité et au travers de nombreux siècles, l’aspect universel a été le seul auquel on ait accordé un plein crédit. (…) Nous sentons nettement que ce n’est que depuis peu que nous commençons à acquérir des données sûres pour fondre en un seul bloc la somme totale de tout ce qui nous est connu.” On remarque là l’influence directe du Cercle de Vienne dont le ‘mouvement pour l’unité de la science’ avait déjà été appliqué à la biologie.fn 2 Au sujet du