Bergson L E Volution Cre Atrice
L’évolution créatrice.
Une édition électronique réalisée à partir du livre L’évolution créatrice. Originalement publié en 1907. Paris : Les Presses universitaires de France, 1959, 86e édition, 372 pages.
Collection Bibliothèque de philosophie contemporaine
Chapitre I: l'évolution de la vie. – Mécanisme et finalité.
Du transformisme et des manières de l'interpréter. Le mécanisme radical : biologie et physico-chimie. Le finalisme radical : biologie et philosophie
Texte p. 37-39.
Les explications mécanistiques, disions-nous, sont valables pour les systèmes que notre pensée détache artificiellement du tout. Mais du tout lui-même et des systèmes qui, dans ce tout, se constituent naturellement à son image, on ne peut admettre a priori qu'ils soient explicables mécaniquement, car alors le temps serait inutile, et même irréel. L'essence des explications mécaniques est en effet de considérer l'avenir et le passé comme calculables en fonction du présent, et de prétendre ainsi que tout est donné. Dans cette hypothèse, passé, présent et avenir seraient visibles d'un seul coup pour une intelligence surhumaine, capable d'effectuer le calcul. Aussi les savants qui ont cru à l'universalité et à la parfaite objectivité des explications mécaniques ont-ils fait, consciemment ou inconsciemment, une hypothèse de ce genre. Laplace la formulait déjà avec la plus grande précision:« Une intelligence qui, pour un instant donné, connaîtrait toutes les forces dont la nature est animée et la situation respective des êtres qui la composent, si d'ailleurs elle était assez vaste pour soumettre ces données à l'Analyse, embrasserait dans la même formule les mouvements des plus grands corps de l'univers et ceux du plus léger atome : rien ne serait incertain pour elle, et l'avenir, comme le passé, serait présent à ses yeux 1. » Et Du Bois-Reymond: « On peut imaginer la connaissance de la nature arrivée à un point où le processus universel du monde serait représenté par une