Charles baudelaire - bohémiens en voyage
Extrait de Spleen et Idéal, première section des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire, parues en 1957. Recueil de vers exaltant la beauté dans toute perversité, toute souffrance. Ouvrage condamné pour "outrage à la morale publique et aux bonnes moeurs" : le poète fait fi des valeurs bourgeoises triomphantes en ce siècle. Son oeuvre fonde la modernité poétique, en particulier le symbolisme. La source plastique de Bohémiens en Voyage est claire : c'est la suite de Callot intitulée "Les Bohémiens en marche", et plus particulièrement la dernière planche : L'Arrière-garde. La "traduction" poétique de Baudelaire fait même un peu plus qu'emprunter à la seule gravure. On lit sur celle-ci ce distique dont l'écho se retrouve dans les deux derniers vers du sonnet : "Ces pauvres gueux pleins de bonadventures / Ne portent rien que des choses futures".
I - TABLEAU PITTORESQUE DES BOHÉMIENS
A. Animalité des Bohémiens
- champ lexical animaux + "fiers" (étymologie : du latin fĕrus = « farouche, sauvage »)
- vers 4 : analogie femmes/animaux ("mamelles", "petits"…), "trésor" renvoie aussi à l'animalité (lait maternel nourricier)
- instinct animal, métonymie "prunelles ardentes" : loups traqués
- vers 1 : "prunelles" = synecdoque qui désigne tous les yeux des Bohémiens
- registre réaliste prosaïque
B. Êtres voués à l'exil
- tableau des Bohémiens en marche + enjambements = dynamisme
- vers 2 : diérèse sur "hier" qui souligne le mot. De plus, il est affecté à la mesure la plus courte (2-4-3-3)
- la mesure la plus longue ("s'est mise en route") concerne la caravane qui s'ébranle. Le premier hémistiche montre le point de départ : allitération de dentales [d] et [t], de labiales [p] = chaos du convoi + [r] = roulement
- Les 3 hémistiches (vers 1, 3 et 4) miment le rythme régulier
- univers lié entièrement à la faim et la fuite : poids de la fatalité
- Bohémiens méprisés, traqués : Baudelaire fait ressortir le Beau du Laid
C. Êtres maudits à