Commentaire extrait de que ma joie demeure jean giono
Extrait de Que ma joie demeure de Jean Giono, 1934
Cet extrait est l'évocation réaliste d'un métier ancestral que le narrateur transfigure par la magie.
Le maniement du métier à tisser par Barbe constitue une description réaliste de la technique séculaire du tissage. Le fonctionnement de la machine est détaillé avec des termes techniques utilisés de telle manière que le fonctionnement du métier peut être physiquement ressenti par le lecteur : « le bruit claquetant des baguettes de la navette, de la barre, le tremblement sourd des montants ». Même si la tisseuse est une « vieille femme sèche », ses gestes sont précis, l'étoffe se construit très vite et elle ne paraît pas faire d'effort particulièrement intense puisqu'elle chante en travaillant. Ce chant « aime, joie » a une connotation très positive, il est associé au bonheur et au plaisir de travailler. Cette technique ancestrale est ainsi fortement valorisée.
Les noms de « Barbe » et « Bobi » ou l'usage du nom de famille « Jourdan » pour surnom sont caractéristiques des usages du monde paysan. L'utilisation du langage parlé « travailler toujours pareil » dans la description et « quoi ? » comme réponse dans le dialogue montrent une rusticité de la langue. Les coutumes et activités aussi ont un caractère rural comme l'habitude de chanter en travaillant ou « d'emmancher une hache » pour s'occuper . Cette authenticité des termes utilisés accentue le réalisme de la scène.
La métaphore filée de la navette transformée en oiseau qui « volait d'elle-même », « se posait » et « s'envolait » est une évocation évidente de la nature mais la nature et la campagne sont aussi présentes dans de nombreuses comparaisons. La plus parlante est l'émotion ressentie par Marthe qui est « comme quand le vent frappe l'étang de Randoulet et que sur l'autre bord la vague bouge ». La précision de cette comparaison souligne la sincérité du propos d'une paysanne qui parle de ce qu'elle connaît bien.