Cournot, le philosophe
Cournot développe une théorie intéressante du hasard. Le hasard est la rencontre de séries causales indépendantes. Imaginons qu'une tuile tombe d'un toit. Il est clair que cet événement est déterminé par des causes (un coup de vent, la vétusté du toit etc.). Je passe dans la rue. Il y a, là aussi, des causes à mon action. La tuile me tombe sur la tête. On parlera alors de hasard. Ce n'est pas que l'événement soit sans cause mais il est clair que ce n'est pas parce que je passe là que la tuile est tombée. Deux séries causales, celle qui préside à la chute de la tuile, celle qui fait que je passe dans la rue, ont simplement interféré.
Il existe donc bien des faits fortuits, aléatoires mais ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui interviennent au hasard mais leurs rencontres. Le hasard n'est nullement dû à notre ignorance mais est affaire de rencontres scientifiquement déterminables.
Ceci s'applique à l'histoire. Cournot pense que l'histoire est l'effet d'un processus toujours différent et toujours complexe. Les causes des évènements (économiques, politiques, morales, religieuses etc.) varient selon les époques selon un processus variable. Cournot s'oppose à la fois à une conception de l'histoire qui ne retiendrait que le fortuit et le contingent et à une histoire qui refuserait de reconnaître la part du hasard dans le cours des évènements.
Il opère une distinction capitale entre cause et raison. Cette distinction s'applique aussi bien à l'explication des phénomènes physiques et vitaux qu'à l'intelligence de l'histoire.
La raison est ce qui rend compte de