« De la littérature comparée aux problèmes de la littérature de masse »
DE LA LITTÉRATURE COMPARÉE
AUX PROBLÈMES DE LA LITTÉRATURE DE MASSE
Depuis le 15 décembre 1965 il existe à l'Université de Bordeaux un nouvel Institut qui porte le nom d'Institut de Littérature et de Techniques artistiques de masse (ILTAM). Cette création marque une étape importante dans le développement de recherches qui ont commencé il y a quelque treize ans.
J'occupais alors depuis deux ans la chaire de
Littérature comparée de la faculté des Lettres et
Sciences humaines de Bordeaux et, en tant que comparatiste, j'étais amené à me poser des questions sur la nature du phénomène littéraire. La littérature nous est traditionnellement présentée comme une anthologie d'oeuvres plus ou moins notables dont certaines sont réputées « mineures » et d'autres « immortelles » ou
« universelles ». On admet qu'il puisse y avoir des redécouvertes, des reclassements dans ce palmarès, mais fondamentalement il ne change guère.
Or la littérature comparée telle que l'a enseignée mon maître Jean-Marie Carré à des générations d'universitaires, conduit rapidement à découvrir deux faits qui infirment cette conception de la littérature.
Le premier est qu'un phénomène littéraire n'a pas forcément le même contenu et la même structure dans deux contextes nationaux ou historiques différents même s'il porte le même nom. En fait la plupart des grands concepts dont se servent les historiens de la littérature et les critiques littéraires (baroque, roman, style, etc.) sont des étiquettes qui recouvrent des réalités disparates dont on ne peut prendre conscience qu'en se référant à l'histoire et à l'analyse des sociétés dont elles sont l'émanation.
Le deuxième fait est que la notion de « grande oeuvre » est loin d'être claire. Pour le comparatiste l'oeuvre importante n'est pas forcément celle que dési350
ÉTUDES FRANÇAISES IT, 3 gnent les critères esthétiques (dont on sait d'ailleurs
qu'ils