Dies irae
9. Les trois poètes étaient membres ou sympathisants du parti communiste.
10. Tadeusz Różewicz, Dożródel [Aux sources], in Przygotowania do wieczoru autorskiego, Warszawa, 1971 (...)
11. Władysław Broniewski, « Warum » [Pourquoi], in Wiersze i poematy, Warsawa, PIW, 1980, p. 216. (...)
12.« Słowiki wtedył śpiewaź y przecieź/ na zabój » : na zabój, qui signifie « éperdument », « à la fo (...)
13.« Śpiewaku-słowiku ! nie bluźnij,/ miasto umiera ! », « O słowiczym okrucie ? twie », « Nadzieja » (...)
14.Aragon (François la Colère), Le Musée Grévin, Éditions de Minuit clandestines, 1943 (republié en 1 (...)
9Après une épigraphe empruntée au psaume 116 (« Les liens de la mort m’avaient enserré »), le premier mouvement rassemble des extraits de poésies de trois écrivains engagés9, contemporains de l’extermination : Broniewski, Aragon, Różewicz. Chacun de ces trois poètes a d’ailleurs douté un moment de la possibilité d’écrire après Auschwitz : Różewicz écrivait : « Je sentais que pour moi et pour l’humanité quelque chose s’était terminé a jamais […] Je me suis détourné avec mépris de l’esthétique. Je pensais que la source de la création ne pouvait être que l’éthique […] Pour moi la création poétique était dans l’action et non plus dans l’écriture de jolis poèmes10 ». Broniewski quant à luise plaignait, dans un poème, d’avoir perdu la parole : « Ma chérie, je n’ai plus de mots11 » et, dans « La cruauté du rossignol », recourait à l’allégorie pour dire l’indicible : au plus noir du ghetto « les rossignols pourtant chantaient éperdument12 » et le poète tentait de leur imposer le silence : « Rossignol chanteur ! ne blasphème pas/ quand la ville se meurt13. » Aragon lui aussi ne remarquait-il pas, dans Le Musée Grévin, que « c’est une absurdité que de mettre des rimes/ À ce que chacun sait silencieusement14 ». Mais tous ont dépassé – chacun différemment – la tentation du silence total.
15. Celui de François La Colère.
10Broniewski écrit Corps