Dans Le Théâtre et son double, Antonin Artaud déplore le fait que le théâtre occidental soit trop axé sur la parole. Il exprime son étonnement devant la découverte du théâtre balinais qui privilégie le corps, la représentation, au texte lui-même. Selon lui, nous privilégions les mots aux autres moyens d’expression sur scène. Notre théâtre est-il donc si obnubilé par la parole ? Nous répondrons à cette question en montrant tout d’abord que la parole est en effet indissociable au du genre théâtral, puis nous verrons l’importance de « l’autre visage » du théâtre, celui de la représentation , du jeu, de l’interprétation, qui forme avec la parole un tout indispensable.

Le théâtre est avant tout parole car ce genre littéraire repose sur le texte dit, qui remplit de nombreuses fonctions, essentielles pour ce type d’œuvres littéraires.
Le théâtre est tout d’abord un genre offrant de multiples possibilités dans la découverte d’une œuvre. Dans la pratique, il se lit souvent comme un roman, s’analyse dans le cadre des études. Certains auteurs accentuent cet aspect du genre théâtral, allant même jusqu’à négliger la représentation, comme Musset et son Spectacle dans un fauteuil, pièce destinée seulement à la lecture. Il veut par cela s’adresser à l’imagination du lecteur, encourageant « l’abandon » de soi-même, la projection dans un décor, une histoire.

On attend également du théâtre qu’il nous « raconte ». En effet, tout comme le roman ou la nouvelle, une pièce met en représentation une « histoire », qui peut être inspirée par des faits réels, la vie quotidienne… Albert Camus s’inspire ainsi de la vie de l’empereur romain Caligula dans une pièce éponyme, montrant sa transformation en despote sanguinaire, d’après l’œuvre de l'historien latin Suétone, Vies des douze Césars. Plus plaisamment, le vaudeville du XIXe siècle, comme Le Fil à la patte de Feydeau, propose des petites histoires comiques, fertiles en rebondissements (dont le fameux « Ciel, mon mari !