Dissertation.

Le lyrisme est, selon Paul Valéry, « le développement d’une exclamation » : de quelle manière cette définition s’applique-t-elle selon vous à la poésie lyrique ? Illustrez ce jugement par les textes du corpus ainsi que par vos lectures personnelles.

A la source du lyrisme se trouve une exclamation personnelle.
Deux grands types de sentiments à la source du lyrisme : l’amour, la douleur (Orphée).
La meilleure expression de ce sentiment se fait par celui qui l’éprouve => JE (explicite ou implicite), la fonction expressive du langage domine (cf. Jacobson)
L’exclamation de Villon croyant sa dernière heure venue, l’exclamation de Ronsard devant la vision de son corps décharné = deux manifestations de lyrisme personnel devant la mort.
Mais le lyrisme peut aussi se passer du JE. Quand R.G.Cadou décrit la dernière image des « fusillés de Chateaubriand », son sentiment est lisible, évident, mais, par pudeur ou hommage, laisse la place au ILS. La première phrase et vers : « Ils sont appuyés contre le ciel » suffit à formuler la détresse, et l’effarement de Cadou, mais en même temps, le sentiment profond du poète pour les 27 résistants.
On peut se demander pourquoi cette démarche d’écrire son émotion.
L’exclamation est par définition fugace, rapide. Pour lutter contre ce moment éphémère, on cherche à figer sa gravité « Je vais mourir ! » s’écrit G. Môquet. Pour les mêmes raisons, Bajtsztok s’exclame « Je ne pensais pas avoir à vous écrire un jour dans de telles conditions, et un tel texte ! » Ce besoin d’écrire, c’est le besoin de donner corps à ce qui pourrait rester de l’ordre de l’indicible : un cri de peur ou de désespoir. C’est ainsi que Chassignet tente de figer ainsi son sentiment d’effroi et d’impuissance à la pensée du cadavre que nous deviendrons tous. Cette « pensée », il l’écrit pour l’expliciter aux autres mortels. On trouve la même démarche pour Seghers « Le vois-tu […] Cinquante fils la mort les prit ». Vision, pensée, sentiment,