Faut il limiter la liberté d'entreprendre ?
Dans son célèbre Journal intime, l’écrivain et philosophe genevois H-F Amiel estime qu’« il convient d’oser, d’entreprendre, d’exposer, si l’on veut réussir. » Plus loin, il ajoute cependant que l’on « ne peut rien entreprendre quand chaque jour amène quelque ennui nouveau. » L’auteur résume en quelques mots les difficultés auxquelles sont confrontées les entrepreneurs contemporains, qui se heurtent à l’intervention de l’État et, plus particulièrement, à celle du législateur qui réglemente — et restreint ? — les champs du possible de l’entreprise économique.
L’auteur considère le fait d’entreprendre dans son sens commun : en effet, on utilise généralement le terme pour désigner le fait de commencer, d’engager une action particulièrement compliquée ou déterminante dans notre vie. Le sens économique recoupe cette définition puisqu’il désigne l’action d’engager une opération industrielle ou commerciale, action qui est censée figurer parmi les droits individuels de notre société démocratique. Cependant, de nombreuses affaires l’ont récemment mis à mal, notamment la confrontation entre les chauffeurs de taxi et le parc de voitures de tourisme avec chauffeur (VTC) de la société Uber. D’aucuns ont considéré les décisions du Conseil constitutionnel, qui s’est prononcé contre la société indépendante, comme une atteinte à la liberté d’entreprendre. Par liberté, on entend l’exercice sans entrave garanti par le droit de telle faculté ou activité. Celle dont il est ici question consiste à permettre le libre exercice de toute activité économique. Elle comporte deux aspects : d’une part, la liberté de fonder une entreprise de son choix et d’avoir accès à l’activité professionnelle souhaitée : c’est la liberté d’établissement, ou interdiction d’ « empêcher », selon Gouges-Cartou, député du Tiers-État au moment de la Révolution. D’autre part, elle comporte l’assurance qu’une fois l’entreprise fondée, la personne juridique constituée