Faut-il redouter les machines
En tchèque, le terme « robota » désigne le travail, la corvée. Aussi, quand en 1921 l’auteur K. Capek écrit une pièce de théâtre mettant en scène une machine qui fait le travail des humains, il nomme cette machine « robot », autrement dit, « le travailleur ». A priori, il n’y a dans cet objet technique rien à craindre : toute technique vise a priori soit à soulager l’homme d’un travail qui provoque sur lui de la souffrance, ou de la fatigue, soit à permettre de faire ce que l’homme seul ne peut pas réaliser. Pourtant, Capek écrivit cette pièce pour décrire les dangers liés au développement des machines et on constate bien que les machines, un siècle plus tard, sont facilement perçues comme potentiellement dangereuses, et ce au point parfois qu’on les imagine prendre le pouvoir sur l’homme lui-même. Entre le risque d’accident et la peur de devenir esclaves des machines, nous devons donc faire la part des craintes rationnelles et des angoisses infondées. Cependant, nous aurons aussi à nous demander si la confiance totale dans les machines est bien placée, ce qui nous conduira à analyser quelle est leur véritable nature, et quel est le véritable rapport que l’homme entretient avec ces objets particuliers.
On peut trouver paradoxal que les hommes aient peur des machines. En effet, a priori, elles ont pour seul but de les servir. L’optimisme vis-à-vis des machines apparaît officiellement au dix-septième siècle sous la plume de Descartes. Prenant conscience de la possibilité d’associer savoir et savoir-faire, il annonce dans son Discours de la méthode que l’homme va pouvoir devenir « comme maître et possesseur de la nature ». L’espoir exprimé par Descartes est ambitieux : il s’agit de libérer l’homme du travail en faisant travailler les machines à sa place. C’est ainsi que Descartes pronostique « l’invention d’une infinité d’artifices qui feraient qu’on jouirait sans aucune peine des fruits de la terre et de toutes les commodités qui