Friedrich.
Rousseau a été, au XVIIIe siècle, celui qui a mis au goût du jour en littérature la nature sauvage, à laquelle on préférait, jusque-là, la nature domestiquée ou arrangée à la manière des jardins à la française. La mer, la montagne, la forêt, considérées avant comme des lieux hostiles, deviennent des endroits privilégiés, propices à la méditation et la génération romantique va s’emparer de ces nouveaux espaces. Un peintre romantique allemand, Caspar David Friedrich, fut ainsi un paysagiste inspiré qui se servit de la mer, de la montagne, de la campagne pour évoquer des états d’âme plus que pour représenter des réalités. Dans un tableau intitulé Deux hommes au bord de la mer, au coucher du soleil, une huile sur toile, datée de 1817, et actuellement exposée à la National Galerie à Berlin, il suggère plus que le motif indiqué dans le titre du tableau. On verra en quoi ce tableau présente bien les tendances romantiques de l’époque. Pour cela, on s’attachera à analyser la symbolique de l’œuvre, en particulier dans la célébration de la nature et dans les sentiments qu’elle génère, qui vont jusqu'au sublime et au sacré.
I) Une célébration de la nature sauvage mais paisible
L’harmonie du soir
C’est un paysage maritime tranquille, vu d’une grève, au crépuscule.
Le cadrage est horizontal : trois plans horizontaux se superposent, la terre, la mer et le ciel, qui se complètent et s’unissent dans un dégradé de couleurs et de lumière qui tient lieu de perspective.
Ce dégradé allant du sombre au plus clair, des couleurs froides aux couleurs chaudes est éclairé au centre par l’ellipse de soleil couchant qui ressemble à un œil gigantesque. Le ciel occupe les deux tiers supérieurs du tableau comme s’il était prêt à englober tout l’espace. On perçoit une alliance secrète dans ce fondu de couleurs, d’ombre et de lumière, entre les quatre éléments : terre, eau, air, feu. Ce clair-obscur avec une prédominance des lignes horizontales