Gestion des compétences salariales
QUELLE INDIVIDUALISATION DE LA RELATION SALARIALE ?
Laurence BARALDI, Christine DURIEUX et Sylvie MONCHATRE
L'objet de ce texte est d'analyser les liens entre les démarches de gestion des compétences et le processus d'individualisation de la relation salariale. La « logique compétence » s'inscrit en effet dans une « doctrine» managériale consistant à associer les salariés aux objectifs de l'entreprise en sollicitant davantage leur participation et leur initiative.
Elle transforme sensiblement les termes de l'échange salarial, dans la mesure où le salarié doit apporter une performance, qui contribue à celle de l'entreprise, et doit recevoir en échange une employabilité, c'est-à-dire la perspective d'être maintenu dans un emploi qu'il aura contribué à assurer (Reynaud, 2001).
Le mouvement d'individualisation de la relation salariale est déjà ancien. En effet, la tendance à l'unification de la relation salariale issue des Trente glorieuses s'est interrompue avec l'entrée en crise du « rapport salarial fordiste » (Boyer, 1981). Dès la fin des années 70, on assiste à une montée de « l'individualisation du traitement des salariés » (Zimmermann, 1999) tant au niveau des rémunérations que des classifications.
En matière de rémunération, le développement de la négociation salariale dans les entreprises, suite aux lois Auroux, et la politique de désindexation des salaires sur les prix ont marqué un retour à l'entreprise pour la fixation des salaires. La politique salariale n'est ainsi plus réductible à l'application de règles exogènes, mais devient avant tout un instrument de gestion du personnel visant à stimuler la productivité des salariés. Il résulte de cette évolution une individualisation croissante- des salaires (Reynaud, 1992b ; Even, 1992) observable dans un recul des augmentations générales au profit des augmentations individuelles[1]. Parallèlement, le discours prônant l'individualisation des salaires s'est au fil des