Gorgias, Platon
Notre extrait s'ouvre donc par la parole de Socrate, qui tient la tempérance pour une vertu . Mais Calliclès prétend que la recherche du plaisir doit guider l'homme . Ainsi, une vie modérée n'est-elle pas plus heureuse, finalement, qu'une vie dépravée, qui court sans fin après les désirs dans le but illusoire de les voir enfin tous satisfaits ? Pour répondre à ce-là, Socrate incarne ces deux « genres de vie » par deux personnages qui ont chacun dans leur cave des tonneaux remplis de délices. Le premier les a remplis après bien des efforts et ne s'en préoccupe plus. Le second a fait de même, mais « ses récipients sont percés », en sorte qu'ils se vident plus vite qu'il ne les remplit. Il n'est ainsi jamais au bout de ses peines. Entendons par là : le premier homme, l'homme tempérant, se méfie des désirs et ne se préoccupe pas de leur donner rapidement satisfaction : il jouit de ce qu'il a déjà, sans s'occuper de ce qu'il pourrait avoir, parce qu'il sait qu'un désir satisfait est aussitôt remplacé par un autre. Le second, en revanche, est en permanence guidé par ses appétits : peu importe ce qu'il a, ce n'est jamais assez, précisément à cause des désirs sans limites. Plus il leur cède et moins il est capable de leur résister, de façon que sa vie devient une course sans fin où il ne rencontre finalement que du malheur. Calliclès cependant n'est pas convaincu. Il ne conteste pas la description que fait Socrate, mais la conclusion que ce dernier en tire : après tout, c'est le désir qui donne son mouvement à la vie, c'est lui qui procure du plaisir lorsqu'on le