Gt textes 3
1ère S-SVT / 624
Séquence n°1 : « science sans conscience n'est que ruine de l'âme »
Groupement de textes
Lectures analytiques :
Texte n°1 : Molière, Les Femmes savantes (1672)
CHRYSALE
Voulez-vous que je dise ? Il faut qu’enfin j’éclate,
Que je lève le masque, et décharge ma rate1 :
De folles on vous traite, et j’ai fort sur le cœur.
PHILAMINTE
Comment donc ?
CHRYSALE, à Bélise.
C’est à vous que je parle, ma sœur.
Le moindre solécisme en parlant vous irrite ;
Mais vous en faites, vous, d’étranges en conduite2.
Vos livres éternels ne me contentent pas,
Et hors un gros Plutarque à mettre mes rabats3,
Vous devriez brûler tout ce meuble4 inutile,
Et laisser la science aux docteurs de la ville ;
M’ôter, pour faire bien, du grenier de céans
Cette longue lunette à faire peur aux gens,
Et cent brimborions dont l’aspect importune ;
Ne point aller chercher ce qu’on fait dans la lune,
Et vous mêler un peu de ce qu’on fait chez vous, Où nous voyons aller tout sens dessus dessous.
Il n’est pas bien honnête, et pour beaucoup de causes,
Qu’une femme étudie et sache tant de choses.
Former aux bonnes mœurs l’esprit de ses enfants,
Faire aller son ménage, avoir l’œil sur ses gens,
Et régler la dépense avec économie,
Doit être son étude et sa philosophie.
Nos pères sur ce point étaient gens bien sensés,
Qui disaient qu’une femme en sait toujours assez
Quand la capacité de son esprit se hausse À connaître un pourpoint d’avec un haut de chausse5.
Les leurs ne lisaient point, mais elles vivaient bien ;
Leurs ménages étaient tout leur docte entretien,
Et leurs livres un dé, du fil et des aiguilles,
Dont elles travaillaient au trousseau de leurs filles.
Les femmes d’à présent sont bien loin de ces mœurs :
Elles veulent écrire, et devenir auteurs.
Nulle science n’est pour elles trop profonde,
Et céans beaucoup plus qu’en aucun