Handicap et sexualité
À travers les désirs et les comportements sexuels des handicapés mentaux et de ce que notre société autorise en la matière, c’est toute notre démocratie et sa modernité qui est interrogée. Regard social, éthique morale, pressions familiales, hiératisme institutionnel et procès aux travailleurs sociaux sont autant de paramètres qui attestent de la complexité d’un tel débat… Les points de vue d’Othon Printz, médecin-psychiatre, directeur de la Fondation Sonnenhof à Bischwiller (Bas-Rhin) et conseiller médical de l’UNAPEI, et de Nicole Diederich, chercheuse au CNRS
La sexualité des personnes handicapées mentales interroge autant les institutions qui les prennent en charge que les familles… et au-delà, notre société. Pourquoi ?
Othon Printz : Votre questionnement rejoint le cycle de ces interrogations qui hantent épisodiquement nos esprits. Durant fort longtemps, les handicapés étaient considérés comme le fruit d’une liaison entre un démon masculin et une femme (incube) ou une diablesse venant la nuit s’unir à un homme (succube). La sexualité de ces « monstres » ne pouvait qu’être bestiale. Ces « images primordiales » alimentent toujours nos angoisses. Prenons-en conscience plutôt que de nous laisser piéger par elles dans l’élaboration d’une idéologie ou d’une éthique.
Il me semble que toute éthique relative à la sexualité de la personne handicapée ne peut être initiée qu’à partir d’une autre écoute en profondeur : celle des pulsions exprimées par la personne handicapée elle-même. Or, toutes celles et tous ceux qui ont été amenés à côtoyer longtemps des personnes, même très profondément handicapées, savent qu’en elles se trouve inscrit le désir d’aimer et d’être aimées. Il faut sans cesse rappeler ça : désir d’aimer et d’être aimé.
Nicole Diederich : En effet, la sexualité des personnes considérées comme « handicapées mentales » a toujours été perçue comme inacceptable socialement voire comme un