Heureux qui comme ulysse du bellay
Pour mener une lecture méthodique de ce sonnet en alexandrins (comme le sont tous les sonnets du recueil) l'on peut adopter les axes de lecture suivants :
_ Lyrisme et expression de la nostalgie
_ La "préférence nationale"
_ Un sonnet éminemment humaniste
Lyrisme et expression de la nostalgie
Si le lyrisme se caractérise par l'expression de sentiments personnels, il n'est pleinement manifeste qu'à partir du second quatrain. Les occurrences du pronom de la première personne, "je", du déterminant "mon, ma" (qui indique ici une relation plutôt que la possession), l'interjection "hélas", en incise sous l'accent d'hémistiche du vers 5, voilà autant de moyens langagiers qui concourent à transcrire l'expression personnelle du sentiment. La modalité interrogative et la répétition de la même question : "reverrai-je", à l'initiale des vers 5 et 7, traduit un sentiment de nostalgie d'autant plus fort (et discret en son expression), que la première question : "Quand reverrai-je", est une interrogation partielle, alors que la seconde : "Reverrai-je" est une interrogation totale. La question ne porte plus sur la date mais sur le fait. Les adjectifs épithètes antéposés, "petit (village)" et "pauvre (maison)" ont de ce fait une valeur affective. L'expression du sentiment semble même déséquilibrer le vers : l'on constate en effet deux enjambements :
Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Ajoutons enfin le lexique, qui associe "pauvre maison" et "petit village" à "une province" (c'est-à-dire un domaine qui peut être un royaume) par la tournure définitive et de subjectivité affirmée : "qui m'est". Le double adverbe "beaucoup davantage" clôt le quatrain avec une lourdeur qui révèle l'insistance, voire le poids de la nostalgie. Poids que confirme l'emploi du présent, opposé aux deux futurs : présent d'énonciation ou