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Elle était si vive, si impatiente, si enthousiaste qu’elle avait l’impression de s’envoler, quitter les rues de
Bruxelles, échapper au couloir de façades, passer les toits pour rejoindre les pigeons dans le ciel. Quiconque voyait sa silhouette légère dévaler le mont des Arts sentait que cette femme, dont une plume ornait les boucles de cheveux, avait quelque chose d’un oiseau…
Elle allait le voir ! Pour de vrai… S’approcher de lui…
Le toucher peut-être, s’il lui tendait la main…
Calme-toi, Odette, calme-toi.
Alors qu’elle avait plus de quarante ans, son coeurs’emballait aussi vite que celui d’une adolescente. À chaque passage clouté qui la contraignait d’attendre son tour sur le trottoir, des picotements parcouraient ses cuisses, ses chevilles menaçaient de s’élancer, elle aurait voulu sauter par-dessus les voitures.
Lorsqu’elle arriva à la librairie, s’allongeait la file des grands jours ; on lui annonça qu’il fallait patienter quarantecinqminutes avant de se présenter devant lui.
Elle saisit le nouveau livre dont les libraires avaient élevé une pyramide d’exemplaires aussi belle qu’un arbre de Noël et commença à deviser avec ses voisines. Si toutes étaient des lectrices de Balthazar Balsan, aucune ne se révélait aussi assidue, précise et passionnée qu’Odette. — C’est que j’ai tout lu de lui, tout, et tout aimé, disaitellepour s’excuser de sa science.
Elle ressentit une grande fierté à découvrir qu’elle connaissait le mieux l’auteur et ses oeuvres. Parce qu’elle était d’origine modeste, parce qu’elle travaillait comme vendeuse le jour et plumassière la nuit, parce qu’elle se savait médiocrement intelligente, parce qu’elle venait en bus de Charleroi, ville minière désaffectée, il ne lui déplut pas de se découvrir, parmi ces bourgeoises bruxelloises, une supériorité, sa supériorité de fan.
Au centre du magasin, trônant sur une estrade, auréolé par des spots qui l’éclairaient autant