Huysmans et a rebours
On considère aujourd'hui cet ouvrage comme un manifeste de l'esprit décadent qui prend forme dans les dernières années du xixe siècle. Des Esseintes préfère les ouvrages de l'Antiquité tardive aux auteurs classiques ; Verlaine, Baudelaire, Corbière, Mallarmé (que l'ouvrage contribua à lancer dans le monde littéraire) sont ses poètes favoris. Chez les romanciers, il fait l'éloge de Poe, du Salammbô de Flaubert, et surtout de Villiers de l'Isle-Adam.
À rebours a contribué à éloigner Huysmans du naturalisme de Zola : la plupart des thèmes présents dans l'œuvre sont ou seront associés à l'esthétique symboliste. Des Esseintes apparaît comme l'archétype du jeune homme européen atteint du «mal du siècle»: on peut dire que l'auteur voit dans la décadence un dépassement à la fois du romantisme et du naturalisme.
L'intrigue est réduite à sa plus simple expression. L'antihéros, des Esseintes, après une vie agitée pendant laquelle il a fait l'expérience de tout ce que pouvait lui offrir la société de son temps, se retire dans un pavillon, à Fontenay-aux-Roses, dans lequel il réunit les ouvrages les plus précieux à ses yeux, les objets les plus rares, pour se consacrer à l'oisiveté et à l'étude. De l'ensemble de la littérature française et latine, il ne retient qu'un petit nombre d'auteurs qui le satisfont. Il admire les tableaux de Gustave Moreau, les œuvres d'Odilon Redon, crée des parfums raffinés, un jardin de fleurs vénéneuses… L'anecdote de la tortue constitue à de nombreux égards une métaphore de la destinée du héros : il fait incruster dans la carapace de l'animal des pierres précieuses, mais celle-ci meurt sous le poids des joyaux.
Finalement, des Esseintes ne