"Il n'était qu'austérité et colère", sainte colombe dans tous les matins du monde
Sainte Colombe est avant tout, dans l’esprit du lecteur de Quignard, et aux yeux du spectateur de Corneau, un homme austère et colérique ; un homme à l’écart de la cour, sauvage et résolument hermite.
C’est un aspect du personnage que Corneau a développé de façon centrale dans son adaptation cinématographique de l’œuvre de Quignard : en passant de la narration neutre et objective du roman à la narration de Marin Marais, il montre en effet Sainte Colombe tel qu’il a été perçu par son élève, et donc quelqu’un d’extérieur à la famille du musicien et à la vie que ce dernier mène, quelqu’un qui s’est introduit dans la vie de cet homme austère. Ainsi, Marin Marais et Sainte Colombe sont des personnages en constante opposition durant la majeure partie du film, de façon à ce que le spectateur décèle la sauvagerie et l’austérité fondamentales de Sainte Colombe. Physiquement déjà, on perçoit des contrastes importants : Sainte Colombe est vêtu de noir, en signe de son deuil et de ses vêtements passés de mode, alors que Marin Marais revêt des couleurs criardes (« rouge comme la crête d’un vieux coq », p.40 dans le roman) ; Sainte Colombe représente la vieillesse, on le voit à son crâne dégarni et à ses cheveux poivre et sel, tandis que la longue chevelure blonde de Marin Marais évoque la jeunesse, conformément aux codes du théâtre grec antique. L’un des deux musiciens, Marin Marais, finira par appartenir à l’univers ostentatoire de la cour (« Marin Marais, à vingt trois ans,