Jean giono
Par Patrick Loiseleur le vendredi 20 mars 2009, 00:04 - Livres - Lien permanent
C'est en 1937 Jean Giono publie un essai d'une centaine de pages intitulé Les vraies richesses qu'il est urgent de relire aujourd'hui (on le trouve chez Grasset dans la collection "Les Cahiers Rouges", mais aussi en livre de poche). Voici un extrait de la préface:
La joie que j'ai dans mon cœur (comme celle que Bobi a dans son cœur) je la touche et je la perds dans le même instant parce que je ne peux pas la partager avec tous. Qu'on m'accuse alors d'avoir trouvé une joie plus terrible que délicieuse, j'en suis fier. Mes délices demeureront quand ils seront communs. Mais quand la misère m'assiège ... Et elle est partout dans le monde, mêlée à une sorte de folie. Les hommes ont créé une planète nouvelle: la planète de la misère et du malheur des corps. Ils ont déserté la terre. Ils ne veulent plus ni fruits, ni blé, ni liberté, ni joie. Ils ne veulent plus que ce qu'ils inventent et fabriquent eux-mêmes. Ils ont des morceaux de papier qu'ils appellent argent. Pour avoir un plus grand nombre de ces morceaux de papier ils décident subitement de faire abattre et d'enterrer cent soixante mille vaches parmi les plus fortes laitières. Ils décident d'arracher la vigne car, si on ne l'arrachait pas, le vin serait trop bon marché, c'est-à-dire ne pourrait plus produire des morceaux de papier en assez grand nombre. A choisir entre les morceaux de papier et le vin, ils choisissent les morceaux de papier. Ils brûlent le café, ils brûlent le lin, ils brûlent le chanvre, ils brûlent le coton. Devant l'énorme bûcher de coton, des chômeurs de l'Illinois viennent: «Laissez-nous emplir des matelas, disent-ils, nous couchons sur la terre, nous ne mangeons presque pas. Nous pourrons au moins dormir. » On leur dit: «Non, le coton est en trop. » Ils répondent: « Pas en trop puisque ce coton nous manque. Il nous donnerait des joies, je vous assure,. enfin, des joies c'est