Jean-marie piemme
« Lorenzaccio » ; impasse d'une idéologie
In: Romantisme, 1971, n°1-2. pp. 117-127.
Citer ce document / Cite this document : Piemme Jean-Marie. « Lorenzaccio » ; impasse d'une idéologie. In: Romantisme, 1971, n°1-2. pp. 117-127. doi : 10.3406/roman.1971.5379 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1971_num_1_1_5379
JEAN-MARIE PIEMME
« Lorenzaccio » :
impasse ďune idéologie
La critique à orientation biographique a souvent loué Musset pour le talent qu'il a mis à faire revivre la Florence des Médicis dans Lorenzaccio. Mais dans le même mouvement elle a pris grand soin de présenter « l'affabu lation historique x » comme secondaire et accessoire par rapport au problème majeur de la pièce : l'ambiguïté de Lorenzo. Réduisant l'Histoire aux dimens ionsd'un décor, elle n'y voyait qu'une variante du « palais à volonté », une autre façon de situer les problèmes éternels de l'individu, en un mot une technique auxiliaire dans l'exposition de la problématique. Au reste, il n'est pas inutile de remarquer que la même réduction a été projetée sur l'œuvre de Shakespeare lorsqu'elle fut prise comme point de référence. Dans l'i mmense production du dramaturge élisabéthain, c'est à Hamlet que l'on a comparé Lorenzaccio et non aux grandes chroniques historiques. La compar aison entre Musset et Shakespeare pouvait s'établir à ce prix : réduire aussi le rôle de l'Histoire dans le théâtre shakespearien à un cadre. En ce point précis, le critique à orientation biographique a substitué sans en avoir conscience sa problématique à celle de Musset et de Shakespeare. Refusant toute Histoire autre que biographique, incapable de concevoir une autre dimension historique que celle des faits empiriques qui se résorbent toujours dans l'individu et le posent comme fondement exclusif de toute interprétation, il a été conduit à ramener les œuvres de Musset et de Shakespeare à de purs drames psychologiques dont l'individu est le seul