Kant vers la paix perpetuelle
Histoire et politique sont deux thèmes récurrents dans la philosophie kantienne, qu’il développe dés ses premiers écrits. Lorsque Kant critique la majesté de la législation ou la sainteté de la religion, il a conscience que l’histoire de la liberté franchit un nouveau pas dans le siècle des Lumières. Il se fait ainsi un devoir de participer à une réalisation de la finalité de la nature. La fécondité de son criticisme, accessible d’après sa conception des Lumières à tous, publiquement (voir Qu’est-ce que les Lumières?), fait de lui le précurseur de la philosophie de l’histoire et de la philosophie politique modernes. « C’est par le mal que commence l’histoire de la liberté, car elle est l’œuvre de l’homme. Si on la raconte empiriquement, l’histoire de l’humanité ne peut donner lieu qu’à un récit privé de sens, plein de bruit et de fureur. Quant au problème de la constitution des
sociétés humaines, il est si peu d’ordre rationnel et moral qu’il pourrait être résolu par un peuple de démons pourvu qu’ils fussent intelligents, puisqu’il s’agirait de trouver un système garantissant leurs vies et leurs biens à des êtres dont chacun voudrait s’exempter des lois permettant d’y parvenir. »
Dans cette optique, Kant publie en 1795 le Projet de paix perpétuelle, qui sera le premier de ses ouvrages traduit en français. En effet, au sortir de la Terreur qui suivit la Révolution française et à la fin de la coalition européenne anti-révolutionnaire, ce texte qui prône la République comme source d’une paix perpétuelle véhicule un vrai message d’espoir. Si Kant n’exploite pas le premier cette idée (elle est intimement liée au siècle des Lumières: l’Abbé de Saint-Pierre en fait la probable introduction dans Projet pour rendre la paix