J'aimerais continuer le fil déjà engagé sur la grande capacité qu'a la langue classique à ouvrir d'autres espaces imaginaires. Depuis longtemps déjà, notre théâtre est confronté à un monde dont le langage s'est "simplifié", à l'image des valeurs dominantes de ce monde, empreintes de rapidité et de violence sous l'influence de l'industrialisation croissante, des cadences de travail qu'une telle industrialisation génère, et, par contrecoup, des modifications dans notre manière de voir, de ressentir le monde que de tels changements ont produits. Il n'est pas exagéré de dire que notre imaginaire s'est "industrialisé". Machinisé, chosifié ou réifié. Bref, que l'homme est devenu second par rapport aux objets qu'il produit. Pour décrire cet état de fait nouveau, le théâtre ne s'en est pas du tout mal tiré. Une compagnie telle que Jolie Môme démontre que le langage moderne est aussi une arme qui garde toute sa saveur pour lutter contre cette réification de l'homme, ce déclassement ontologique. Avec son spectacle Spartacus, Jolie Môme démontre que l'espoir est toujours possible, quand bien même tout est mis en oeuvre pour étouffer cet espoir. Car, dans chacune de ses créations, cette compagnie met en scène et joue avec le langage de manière à transfigurer les situations d'oppression. J'ai tenu à saluer le magnifique travail que réalise quotidiennement cette compagnie de théâtre, qui montre que le langage actuel, même s'il est à l'image de notre société de consommation, recèle toujours en lui des capacités à retourner la situation à l'avantage des opprimés, à condition évidemment qu'ils veuillent se saisir des outils mis à leur disposition. Mais cela marche avec le langage de nos jours qui offre des signes et des symboles immédiatement repérables, comme autant de clés pour ouvrir les portes de la connaissance à un autre possible.
Ces repérages sont plus difficilement décelables avec le théâtre classique qui, comme je l'expliquais, est fortement investi sociologiquement par