Essais de Théodicée Sur la bonté de Dieu, la liberté de l'homme et l'origine du mal
Paris, 1969, Garnier-Flammarion G.W. Leibniz

Introduction
Les Essais de Théodicée, parus en 1710, ont pour but explicite de « plaider la cause de Dieu »1 en raison, en réponse au Dictionnaire Historique et Critique de Pierre Bayle (1647 – 1706). Malgré la mort de Bayle, nombre de philosophes et théologiens continuèrent de discuter sa pensée. Savoir pourquoi Pierre Bayle fit autant polémique est un vaste sujet que nous ne traiterons pas ici, mais il importe de comprendre pourquoi Leibniz (1646 – 1716) eu besoin d'entrer en discutions avec son contemporain, tous deux pourtant de confession protestante (Bayle était cependant calviniste, et Leibniz luthérien). Ces controverses théologiques et philosophiques se placent sur fond de la révocation de l'Edit de Nante (18 octobre 1685) par Louis XIV en France, qui réaffirme la primauté de la religion catholique face à la religion protestante. La Réforme Protestante en Europe avait considérablement remis en question l'autorité de l'Eglise en tant qu'institution et en tant qu'autorité pour l'énonciation et la compréhension des dogmes de la religion chrétienne. Catholiques et protestants s'affrontèrent à partir du XVI ème siècle, tant sur des questions pratiques que sur des questions théoriques, avec pour principal reproche contre le catholicisme le manque de rationalité dans ses dogmes. Leibniz et Bayle se situent au coeur de ce renversement paradigmatique, où l'on passe d'une raison qui doit évoluer dans les limites de la foi 2, à une foi qui doit être expliquée en raison. La patristique avait fixée les limites de la fonction de la raison, qui devait seulement être apologétique et évoluer dans le stricte cadre de la foi. L'ambition de Leibniz est non seulement d'enraciner la foi en raison, mais de rendre raison de tout le système dogmatique chrétiens (néanmoins en le discutant) et de la foi, face à une dérive institutionnelle