La valeur d'une civilisation
La notion même de civilisation peut se définir en s’opposant à celle de barbarie ou de sauvagerie : c’est parce qu’une société témoigne d’un certain progrès matériel et humain qu’elle peut être considérée comme plus civilisée que d’autres, notamment parce que ses mœurs sont plus pacifiées, parce que le droit démocratique y est instauré, parce la science et la technologie y sont plus avancées. Ainsi existerait-t-il des sociétés plus décentes à l’égard des plus faibles, plus humaines, plus justes et plus libres, moins humiliantes, plus “ modernes ” en somme, en comparaison d’autres cultures moins respectueuses de la personne humaine, et d’autres sociétés moins évoluées sur le plan du savoir et des découvertes scientifiques, moins avancées techniquement. Mais une telle hiérarchisation des sociétés humaines dans l’espace ou dans le temps est-elle vraiment possible ? Existe-t-il des critères nous permettant de dire qu’une société vaut plus qu’une autre ? Le développement technique, par exemple, peut être considéré comme un indice du développement humain. C’est en ce sens que l’on considère souvent que la valeur d’une civilisation se reconnaît au développement de sa technique. Mais est-il le seul critère ? Là où l’homme primitif ne possède que quelques outils, l’homme moderne lui, dispose, certes, de la puissance technologique, de l’automation, de la maîtrise de la nature, de l’intelligence et donc d’un plus grand pouvoir sur le monde. Ses performances sont incomparables. Pour autant faut-il faire du progrès technique le critère essentiel qui permet de mesurer la valeur d’une civilisation ? On peut craindre en effet que le progrès technologique implique des risques, des menaces nouvelles qui viennent précisément de son développement sans fin et il n’est pas certain qu’il soit toujours libérateur. Le problème sera donc de savoir si le progrès humain a pour principe essentiel le développement matériel et technique ou bien s’il n’existe pas des critères plus