La violence économique
La violence économique
Introduction
L’individu est par essence l’homme de la violence : homo sapiens, homo erectus, homo economicus, homo politicus… toutes ces qualifications semblent venir troubler l’unité du vivant, caractère qui lui est pourtant coextensif et donc inaliénable. Aussi, pour retrouver cette unité originelle, faut-il considérer l’individu comme l’homo violens (1) par excellence et statuer sans plus attendre : la violence constitue l’une des fonctions structurantes de notre humanitas(2). Plus encore, si l’on s’en tient au cynisme presque édifiant de Mandeville (3), «si un peuple veut être grand, le vice est aussi nécessaire à l’Etat que la faim l’est pour le faire manger, la vertu seule ne peut faire vivre les nations ». C’est dire que le vice non seulement constitue intrinsèquement notre humanité, mais en plus lui est utile : private vices, public benefits, dit la vox popula anglaise. Ces affirmations ne sont pas sans conséquences ; quelles questions de droit sous-tendent-elles ? Si ce sont les économistes qui les premiers se sont interrogés sur la question de l’utilité de la violence, de sa légitimité, ainsi que de ses limites, le droit français ne s’intéressera à la notion de violence économique, qu’il semble distinguer de la violence physique et de la violence morale, que bien plus tard.
La violence économique doit être entendue, dans une approche générale, comme « l’exploitation ou la menace exercée sur les intérêts purement économiques d’une personne pour obtenir un consentement qu’elle n’aurait pas donné spontanément »(4). Il s’agit donc de justifier la défense des intérêts de la partie contractante la plus faible : mais au nom de quelle justice protéger le contractant sur lequel le fort tire avantage de sa supériorité, fût-elle intellectuelle, sociale, statutaire ou économique ? Ne risque-t-on pas ainsi d’attenter à la liberté