La vérité
Qu’est-ce que la vérité ?
On peut entendre par là, selon les cas, la conformité de la pensée avec la réalité (« connaître la vérité »), la conformité de nos paroles avec nos pensées (« dire la vérité »), ou encore la conformité d’une chose à l’apparence qu’elle nous donne (« de l’or véritable »). Dans tous les cas, la vérité ne doit pas être confondue avec la réalité. Elle n’est pas une chose, mais une relation : relation de conformité ou d’accord entre nos pensées, nos paroles et la réalité. On peut, si l’on veut, parler plutôt de « véracité », pour désigner l’accord de nos paroles avec nos pensées (le contraire du mensonge), et réserver le terme de « vérité » à l’accord de nos pensées avec la réalité (le contraire de l’erreur).
Dans ce dernier cas, la « vérité » est essentiellement une propriété de nos jugements (ou des énoncés qui les formulent), et non une qualité des choses elles-mêmes (le cas de l’or « véritable » n’est qu’une exception apparente : la fausseté n’est pas dans la chose, mais dans le jugement que nous portons sur elle).
Lorsque l’on demande, en effet, « Qu’est-ce que la vérité ? », on veut plutôt savoir ce qui permet de la reconnaître ou de l’identifier comme telle : on cherche alors un « critère » de la vérité. Mais comment ne pas tomber alors dans un cercle vicieux ? Comment reconnaître la vérité d’un critère de vérité, si l’on ne dispose pas déjà de lui ? Et comment pourrait-il y avoir un critère universel de vérité, abstraction faite de son objet, si la vérité consiste justement dans l’accord d’une connaissance avec son objet, et ne doit donc pas en faire abstraction ? Le seul critère universel, purement formel, est la non-contradiction, mais ce n’est qu’une condition nécessaire, et non suffisante, de la vérité. De là au scepticisme, le pas est vite franchi, et d’autant plus aisément que la prétention à détenir la vérité peut sembler une marque d’intolérance.
Mais peut-on si facilement renoncer