ET n° 3 : Les Caractères, La Bruyère, 1688, VIII, « de la cour », 74.
L'on parle d'une région où les vieillards sont galants, polis et civils ; les jeunes gens au contraire, durs, féroces, sans mœurs ni politesse : ils se trouvent affranchis de la passion des femmes dans un âge où l'on commence ailleurs à la sentir ; ils leur préfèrent des repas, des viandes, et des amours ridicules. Celui-là chez eux est sobre et modéré, qui ne s'enivre que de vin : l'usage trop fréquent qu'ils en ont fait …afficher plus de contenu…

C’est le cas dans la description des jeunes gens.
EX : « ils cherchent à réveiller leur goût déjà éteint par des eaux-de-vie, et par toutes les liqueurs les plus violentes ; il ne manque à leur débauche que de boire de l’eau-forte ! » (l. 5-7)
➢ Le début de la phrase oppose d’emblée la jeunesse des ces personnes à l’idée d’une usure prématurée, et le tableau est ici construit sur le principe de la gradation : on passe des « eaux-de- vie » aux « liqueurs », renforcées par le superlatif « les plus violentes ». Or la deuxième proposition semble poursuivre logiquement la surenchère et proposer une prochaine expérience inimaginable :
« l’eau-forte ». L’écriture ici frise volontairement le ridicule. Au passage, le narrateur fait …afficher plus de contenu…

Or le texte applique ce regard étranger, naïf à la cour, à
Versailles. La problématique se noue autour de ce regard particulier, dépaysant, qui est porté sur la cour : comment La Bruyère utilise-t-il le regard étranger, dépaysant, pour mieux montrer ou représenter à son lecteur les inconséquences voire absurdités de la société du XVIIe siècle ? Nous verrons dans un premier temps que le texte peut se lire comme un jeu mondain proposant un regard décalé et inhabituel sur la Cour pour en souligner l’étrangeté. Toutefois, nous verrons dans un second temps que ce dispositif vise surtout la satire : il s’agit de révéler ce qui se cache derrière cette organisation bien fixée. Dès lors, nous