Le culte du corps
La forme du corps humain n’est pas naturelle mais culturelle. Le poids, la taille, la grosseur, la couleur, la forme des différentes parties d’un corps varient selon les groupes. On peut établir un rapport entre ces données corporelles et l’environnement ; il est à la fois celui de la causalité et de l’adaptation. Les Eskimos sont-ils petits et gras à cause de leur alimentation de phoques et de poissons ou de leur adaptation au froid ? Pourquoi les Pygmées de la forêt équatoriale sont-ils parmi les groupes hu mains les plus petits ? Mais les corps sociaux actuels relèvent moins des données physiques que des fantasmes collectifs de la société. La part de l’esprit est plus importante que le conditionnement physique.
LE CORPS MARQUE Ce n’est que tout récemment que l’on s’est mis à étudier le corps. Cela a commence avec l’ethnographie. On ne voit pas son propre corps ni le corps des siens. Pour les premiers ethnographes seuls les autres ont un corps, surtout les étran gers qui ont un corps étrange. Les sauvages ont des corps qui les apparentent aux animaux plus qu’à l’humain. Les premiers voyageurs les ont vus : Plan de Carpin en 1245 et Rubruquis en 1253 décrivent des acéphales au visage sur la poitrine, des cyclopes à un seul oeil sur le front, des hommes à deux têtes et des corps à écailles de poisson. Marco Polo en 1298 nous parle des hommes à tête de chien des îles Adaman, des sciapodes qui vivent à l’ombre de leur unique pied et de ceux de Labrin à Sumatra qui ont une queue longue d’une paume et grosse comme celle d’un chien. Puis les premiers ethnographes se sont lancés dans la des cription de toutes les marques que les sauvages mettent sur le corps humain : cicatrices, bourrelets, scarifications et boutonnières des Africains, les labrets et les négresses à plateau, perforations du nez et des oreilles, taille et incrus tation des dents, modelage du crâne des enfants, petit pied des Chinoises,