Le culte du corps
( à paraître en Pologne 07 Entretien réalisé par Dorota Sikora-Pouivet Doctorante Nancy 2.) Bernard Andrieu, professeur de philosophie, enseigne à l’université Henri Poincaré à Nancy. Il dirige le groupe de recherche ACCORPS Actions, Cultures et Corporéités. Auteur de 25 livres consacrés aux conceptions et au fonctionnement du corps dans le monde contemporain, il vient de publier le Dictionnaire du corps élaboré sous sa direction.
Ozon : L’un de vos livres s’intitule « Les cultes du corps ». Pourquoi avez-vous employé le pluriel ? Pourquoi pas le culte du corps, tout simplement ? Bernard Andrieu : Le culte du corps renvoie aux années quatre-vingt, l’époque où sont apparus les premières salles de sport ouvertes au grand public. C’est l’époque des grands succès de la musculation et des compétitions où l’on comparait et évaluait les silhouettes. On pouvait alors parler du culte du corps, puisque son entretien était envisagé dans un seul sens : il s’agissait de développer la masse musculaire, avoir un ventre plat. C’est une conception très classique, issue de la tradition gymnastique du XIX siècle. Elle a d’ailleurs survécu jusqu’à nos jours à travers la norme anorexique de la femme. Tous les mannequins doivent ressembler à Kate Moss dans sa phase anorexique. Seulement, aujourd’hui d’autres courants apparaissent, plus écologiques dans leur approche du corps. Ils se manifestent dans l’entretien du corps par des thérapies tactiles, massages, hydrothérapies, spas qui commencent à pénétrer dans nos salles de bain. Ce n’est plus le muscle qui compte, mais l’énergie que le sujet veut retrouver.
Il y eut des périodes dans l’histoire où le soin corporel était au moins aussi important qu’aujourd’hui. Dans l’ancienne Egypte, hommes et femmes utilisaient le maquillage ; Au XVIII, on portait des perruques, on se poudrait. En quoi ces attitudes étaient-elles différentes des nôtres ? Toutes les sociétés imposent des normes collectives qui réglementent