Le devoir relève de la contrainte, de l’obligation. La mémoire, quant à elle, est une faculté partagée par l’homme et par certains animaux de rétention de perceptions sensibles. La mémoire sensible ne semble donc pas faire l’objet d’un devoir, mais serait plutôt d’ordre mécanique. En effet, nous n’avons pas l’impression d’obéir à un ordre lorsque surgissent en nous des souvenirs. Néanmoins, certains souvenirs ne se conservent peut-être pas automatiquement, et il faut savoir entraîner sa mémoire pour la faire fonctionner correctement. La mémoire relève donc bien alors de l’effort, et c’est ainsi que l’on peut parler de « devoir de mémoire ». Mais ne devrait-on pas permettre à la nature de faire son œuvre, en laissant libre cours à la mémoire de ne retenir que ce qui lui plait ? Qu’est-ce qui justifie que l’on doive lutter contre l’oubli ? La mémoire peut-elle faire l’objet d’une injonction morale ?
S’il y a un devoir de mémoire, c’est d’une part, pour conserver la trace du passé et instituer une histoire, d’autre part, pour reconnaître la dette contractée du présent envers le passé, et enfin, pour rendre justice et réparer les erreurs passées.
[Il est certains crimes que l'on ne doit pas oublier afin de ne pas les commettre à nouveau. Il est des événements historiques tragiques que nous avons le devoir de ne pas oublier afin d'éviter qu'ils ne se reproduisent. C'est le cas, notamment, de l'Holocauste. Nous devons aussi lutter contre l'oubli de certaines choses.]
[L'oubli est une faculté naturelle de la mémoire. On ne peut pas se forcer à se souvenir. L'oubli est un phénomène vital pour la mémoire. Il faut savoir oublier pour progresser. On ne peut se complaire dans le passé ni être obsédé par les mauvais souvenirs. La mémoire étant spontanée, on ne peut l'obliger à se