Le dizain de neige
Anne Valençon.
Texte:
Anne par jeu me jeta de la neige
Que je cuidais froide certainement
Mais c'était feu, l'expérience en ai-je
Car embrasé je fus soudainement.
Puisque le feu loge secrètement
Dedans la neige, où trouverai-je place
Pour n'ardre point? Anne, ta seule grâce
Eteindre peut ce feu que je sens bien,
Non point par eau, par neige, ni par glace,
Mais par sentir un feu pareil au mien.
Thèmes:
@ Le Renouvellement d'une métaphore clichée
@ L'Amour Poison (jeux de langages)
@ L'Art du Compliment
Analyse:
v.1 - v.7,5 : Récit de la naissance d'un amour
v.7,5 - v.10 : Requête
Alliteration en /j/ : "jeu" "jeta" "neige" "en ai-je" "loge" "trouverai-je" "je"
Assonance en /è/ : "neige" "cuidais" "certainement" "c'était" "ai-je" "soudainement" "secrètement" "trouverai-je"
Rime équivoquée : "de la neige" / "en ai-je"
= la neige a "contaminé" le langage
Assonance en /e/ : "Eteindre peut ce feu que je sens bien"
Alliteration en /f/ : "froide" "feu" "fus"
= le feu a envahi le poème
Assonance en /a/ : "jeta" "froide" "embrasé"
= Anne imbibe les vers de Clément
Métaphore topos de la flamme = prise au 1er degré
v.1 "Anne" premier mot = sujet abordé par Marot
v.2 "froide" à l'hemistiche = préparer le coup de théâtre
v.3 "Mais c'était feu, l'expérience en ai-je" virgule = rupture
v.5 "puisque" connecteur logique = renforce le paradoxe de l'amour ainsi que la métaphore filée jusqu'à l'absurde
v.7 Passage MONOLOGUE => DIALOGUE au beau milieu du vers qui est brisé comme le coeur de Marot
v.9 gradation de + en + froid "eau" < "neige" < "glace" = mise en relif de la difficulté d'éteindre le feu
v.10 chute, pointe de l'épigramme = paradoxe : seul un feu peut éteindre ce feu = mise en valeur de l'absurdité du sentiment
CONCLUSION:
Marot utilise un lieu commun de la poésie de Pétrarque qu'il détourne avec la neige.
Mise en péril de l'être.
Souffrance de l'amour unilatéral :