LE juge constitutionnel et le devoir d'ingratitude
Il est banal de rappeler, des siècles après, ad litteram, la célèbre et éclairante phrase de Lord Acton « le pouvoir rend fou, le pouvoir absolu rend absolument fou ». Car, il est d’une vérité éternelle, renchérit Thucydide « tout homme tend à aller jusqu’au bout de son pouvoir ». Le remède à cette maladie anthropologique, politiquement mortifère, est l’existence de contre-pouvoir. Et justement, l’avènement du conseil constitutionnel, dans le système juridictionnel ivoirien, en 1994, s’analyse comme tel. La dialectique de l’action et de la réaction anime et alimente le jeu politique. Les politiques (le gouvernement et le parlement) agissent, le conseil constitutionnel réagit. La réaction du juge constitutionnel revêt un tripe enjeu juridique et politique. D’abord, elle vise la protection de la constitution en consacrant sa suprématie dans l’ordre juridique interne, ensuite, la garantie et la consolidation de la séparation des pouvoirs, et enfin, sa mission ultime est d’encadrer l’alternance et à en régulariser le cours sans s’opposer à la volonté exprimée.
Revêtue de l’onction de son géniteur(le peuple souverain), la constitution se trouve au faîte de la hiérarchie des normes juridiques. C’est la norme des normes. En effet, parce que fondement du traité, de la loi et du règlement, elle leur est supérieure. C’est le fondement juridique de l’Etat. Pour affirmer cette suprématie constitutionnelle, le constituant à confié au juge constitutionnel, la mission de veiller à ce que les normes inferieures ne lui soient pas contraires. Le contrôle de constitutionalité des lois se fait en amont et en aval de la procédure législative. C’est donc un contrôle préventif voire dissuasif, quant on sait l’instinct violateur et immodéré de l’exécutif et du législatif en la matière. Le contrôle à posteriori ou exception de constitutionalité existe et prend des allures plus libérales. De ce qui précède, le rôle