Ces quelques lignes écrites par E.R. Dodds au tout début de son livre (Les Grecs et l’irrationnel) illustrent l’immense mérite des philosophes présocratiques (philosophes ayant enseigné avant Socrate c’est à dire de la fin du 7e siècle jusqu’à la fin du 5e siècle av. J.C) qui eurent le courage de jeter les bases d’une pensée nouvelle. Pour la première fois en Occident, les cosmogonies (récits mythiques non-rationnels censés expliquer l’origine du monde) furent contestées au profit de conceptions pouvant être qualifiées de pré-rationnelles. Empruntant le chemin des cosmologies naissantes (discours rationnel sur la formation et la structure de l’univers) le logos (du grec.: log (o) ou parole, discours, science) cessa progressivement d’être un «.récit sacré.», né de la pensée magique, pour s’orienter progressivement vers des acceptions beaucoup plus proches de l’univers scientifique. Outil incontournable de la langue philosophique, le logos accompagna les diverses étapes franchies par la raison. Ce cheminement, d’ailleurs, lui valu parfois de spectaculaires régressions dont la plus dommageable fut sans aucun doute celle infligée par Jean qui, dans le quatrième évangile (1er siècle apr. J.C.), recourut à cette notion pour désigner exclusivement la parole divine. Par contre, l’inexorabilité de cette diachronie (caractère des phénomènes analysés du point de vue de leur évolution dans le temps) pose un certain nombre de problèmes en raison des divers sens qu’il revêtit. Ceci explique qu’il soit indispensable de définir préalablement le contexte philosophique (en fait, la position de la raison) d’une période donnée avant même d’essayer de comprendre ce qu’il signifiait durant cette même période. L’une des erreurs les plus souvent commises consiste à «.se tromper d’époque.» soit en attribuant indûment notre manière de penser à des systèmes philosophiques trop anciens ou en confondant des périodes trop distinctes. A titre d’exemple, il est assez fréquent que l’on assimile