Le personnage
Les travaux des formalistes russes des années 20, Propp, Chklovski, Tomachevski ont été traduits et connus tardivement en France, où ils ont eu une influence considérable.
Chklodski, Théorie de la prose, 1925, trad en 1973 : « Gil Blas n’est pas un homme, c’est une fil qui relie les épisodes du roman » (in Théorie de la littérature, Todorov, 1965, 2001).
Tomachevski, (« Thématique », 1925) : « le personnage joue le rôle de fil conducteur permettant de s’orienter dans l’amoncellement des motifs, d’un moyen auxiliaire destiné à classer et à ordonner les motifs particuliers ».
« Le héros n’est guère nécessaire à la fable. La fable comme système de motifs peut entièrement se passer du héros et de ses traits caractéristiques ».
Cette conception du primat de la « fable », « l’intrigue », l’histoire, n’est pas très éloignée, à certains égards de celle d’Aristote, pour lequel la tragédie est mimesis d’actions.
Les « personnages » sont appelées les « prattontes » de prattein, faire : les agissants, ou les actants. La bonne tragédie, dont le but, le telos, est de provoquer la terreur et la pitié, résulte de combinaisons heureuses entre personnages bons, méchants ou moyens, types de relations entre les personnages (alliance, hostilité, neutralité). Aristote consacre le primat de l’action dont l’influence se répercute jusque dans la narratologie contemporaine. Dans le théâtre antique, il y a une correspondance étroite entre les personnages, leur statut social, le type de théâtre étroitement codifié auquel ils appartiennent. Les pièces de Plaute, comme l’a montré
F. Dupont, sont tout à fait réductibles à une combinatoire de personnages-type, identifiables par leur costume, leur masque : « Par exemple senex (Vieux) est un rôle-type. Tout senex aura tendance à être radin, peu communicatif, ennemi du plaisir et grognon. Quand ce rôletype est présent dans deux personnages d’une même comédie, il y a automatiquement une