Le recul de la faute lourde
Au cours du XIXème siècle, la possibilité d’imposer à la puissance publique l’obligation de réparer les dommages causés soit par son action ou son inaction était exceptionnelle. En effet, le principe prévalent était celui de l’irresponsabilité de l’administration, liée à l’idée exprimée par Laferrière que « le propre de la souveraineté est de s’imposer à tous, sans qu’on puisse réclamer d’elle aucune compensation ». L’arrêt Blanco opère alors un véritable revirement jurisprudentiel. Le 8 février 1873, le Tribunal des Conflits, dans la décision Blanco, affirme que « la responsabilité qui peut incomber à l’Etat-puissance publique pour les dommages causés aux particuliers n’est ni générale ni absolue. Elle a ses règles spéciales ». Une responsabilité administrative est ainsi affirmée, de même que son autonomie par rapport à la responsabilité de droit privé. La responsabilité administrative ne doit être « ni générale, ni absolue » afin d’éviter que cette dernière ne soit trop souvent mise en œuvre, aboutissant alors à une paralysie de l’action administrative. Cependant, autonome depuis l’arrêt Blanco, le régime de la responsabilité administrative, largement prétorien, n’a cessé de progresser, jusque dans les activités de plus grande souveraineté de l’Etat, comme celles de police (CE, 10 février 1905 – Tomaso Greco). Toutefois, la responsabilité administrative est, en principe, une responsabilité pour faute car il n’est rien de plus normal que d’être responsable des conséquences de ses fautes, ou des fautes commises par les personnes dont on doit répondre. La faute, selon Marcel Paniol, se définit comme « un manquement à une obligation préexistante » mais, contrairement au juge judiciaire, le juge administratif n’estime pas que toute faute ouvre droit à réparation par un engagement de la responsabilité administrative. La jurisprudence a ainsi fixé des limites à cette responsabilité en exigeant de la part de la victime, la preuve que le