Comme procédé d'expression directe de la souveraineté populaire, le référendum a longtemps été reçu comme un corps étranger dans la tradition constitutionnelle française. Certes, l'appel au peuple pour faire adopter une constitution est une innovation révolutionnaire (le premier référendum de l'histoire constitutionnelle a été organisé pour l'adoption de la constitution du 24 juin 1793), mais son usage à des fins plébiscitaires par les deux Bonaparte, Napoléon d'abord (en 1799, 1802, 1804 et 1815), Louis-Napoléon ensuite (en 1851, 1852 et 1870) l'a pour une longue période discrédité, jusqu'à ce que le général de Gaulle y recourre le 21 octobre 1945 pour donner une légitimité démocratique à la reconstruction constitutionnelle de la France. Deux autres référendums auront lieu en 1946, les 5 mai et 13 octobre, pour mettre en place - difficilement - la IVème République dont la Constitution ne prévoit cependant le référendum qu'en matière constituante. Et c'est par un nouveau référendum constituant, le 28 septembre 1958, que la Vème République succède à la IVème.
Dans quelle mseure la procédure référendaire dans le texte constitutionnel de 1958 montre certaines dérives et des détournements constitutionnels ?
Ainsi dans une première partie nous verrons quelle est la procédure référendaire dans le texte constitutionnel de 1958 et dans une seconde partie quelles sont les dérives et détournements constitutionnels ?
I. La procédure référendaire dans le texte constitutionnel de 1958
Tournant le dos à ce passé contesté, la Constitution du 4 octobre 1958, en son article 3, 1er alinéa, paraît ouvrir toute grande la porte du référendum : "la souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum". Mais dans la suite de la Constitution, les hypothèses de recours au référendum sont plus restrictivement définies. Ces hypothèses sont celles prévues à l'article 11 pour le référendum législatif, et à l'article 89 pour le