"Les antiquités de rome" du bellay
Dix ans après l’Edit de Villers-Cotterêts (1539) qui instaure l’usage du français à la place du latin dans tous les documents administratifs, Joachim du Bellay ( 1522 – 1560 ) rédige le manifeste de la Pléiade, Défense et Illustration de la langue française : les poètes de La Pléiade y expriment leur volonté de défendre le français contre ses détracteurs : ils souhaitent écrire en français et non plus en latin, enrichir leur vocabulaire en langue française – y compris le vocabulaire prosaïque et technique, sans refuser pour autant de composer des œuvres inspirées des Anciens – les auteurs grecs et latins. En poésie, ces écrivains imposeront l’alexandrin et le sonnet, et particulièrement Du Bellay qui publie son dernier grand recueil, Les Antiquités de Rome, en 1558, après son retour d’Italie où il venait de séjourner. Le « sonnet XXX », tiré de ce recueil, est écrit en alexandrins. L’auteur compare l’évolution de l’Empire Romain à celle d’un champ, mais, comme le comparant est cité avant le comparé, il faut attendre la lecture des tercets pour connaître le thème du poème : la décadence de Rome qui traduit en fait la déception du poète. Il semble intéressant de montrer comment le poète décrit l’évolution du champ, puis comment il envisage la décadence de l’Empire romain, et enfin en quoi ce texte se veut un texte argumentatif.
Tout d’abord, il faut examiner les deux quatrains, qui représentent le comparant, c’est-à-dire le champ. Y sont étudiées les différentes étapes de la culture : vocabulaire typique, couleurs, sonorités imitatives ou suggestives. On relève en premier lieu le champ lexical de l’agriculture – « champ », « verdure » ( v. 1 ), « épi » ( v. 3 ), « grain » ( v. 4 ), « le rustique », c’est-à-dire « le paysan » ( v. 5 )… On suit progressivement la culture du champ : d’abord la semence et la pousse du blé dans le premier quatrain – « champ semé », « en verdure foisonne », « se hérisse », « épi florissant », « jaunit », puis la