Lettre a schuller
Spinoza montre en fait que la question de la liberté a toujours été mal posée. Nous sommes en 1674, c’est le début de la science moderne (depuis Galilée) qui vient de montrer que dans la nature tous les phénomènes sont déterminés par des causes.
Autrement dit, c’est le règne du déterminisme : une cause entraîne des effets qui à leur tour deviennent des causes entraînant des effets, et ainsi de suite. Rien n’arrive sans cause et toute la nature est comme un système clos où toutes les choses s’entre-déterminent. Dans ce cas, un acte libre devient impensable, ce serait une sorte de monstre : un miracle (quelque chose qui arrive sans cause, de lui-même), une suspension des lois ordinaires de la nature. Et justement Spinoza soutient que l’homme ne fait pas exception dans la nature.
Il croit agir librement, mais c’est simplement parce qu’il est inconscient des causes qui le déterminent. L’homme ne fait pas exception au déterminisme naturel, il n’est pas « un empire dans un empire ». Il obéit aux mêmes lois que le reste de l’univers, même s’il n’en a pas conscience.
D’où vient alors l’idée de liberté ? L’homme pense être libre : il sent bien qu’il ne fait quelque chose que s’il a décidé de le faire. Autrement dit, il croit que ses actes sont volontaires, qu’il a le choix de ses actes. C’est la conception que défend Descartes dans les Principes de la philosophie1 : « la liberté de notre volonté se connaît sans preuve par la seule expérience que nous en avons ».
La liberté de la volonté est quelque chose que l’on sent, dans une sorte d’expérience intérieure qui ne peut mentir : vouloir quelque chose, c’est sentir en même temps qu’on aurait aussi bien pu vouloir autre chose.
Mais Spinoza lui répond que même sa volonté a été déterminée à prendre telle ou telle décision, de même que telle cause