En histoire de la philosophie, il est traditionnel d’opposer deux types d’écrits et deux formes d’activités très différents. D’un côté, il y a les philosophes originaux, qui représentent l’objet de l’histoire de la philosophie, de l’autre, les interprètes, qui étudient cette histoire…… Le philosophe étudie la réalité, tandis que l’interprète étudie la théorie que le premier a produite. C’est pourquoi il y a entre eux un rapport de subordination : il faut que le philosophe ait déjà produit une théorie pour que l’interprète puisse trouver en elle son objet…. L’interprète vient donc en second dans un double sens : premièrement parce que son objet est le produit du philosophe étudié, et ensuite parce que son but est de restituer la pensée du philosophe étudié avec la plus grande fidélité possible, tandis que le but du philosophe était de reconnaître la vérité…..Pour reprendre une formule de Spinoza, qui a fixé justement la différence entre le philosophe appliquant sa raison à la nature directement et le théologien, conçu par lui comme commentateur de textes, on peut dire que le philosophe vise la vérité, tandis que l’interprète vise seulement le sens d’un texte …leur fonction est tres differente ….Pour le philosophe, il s’agit de découvrir la vérité et de l’exprimer. Pour l’interprète, il s’agit d’examiner cette expression pour la clarifier, pour la réactualiser, ou pour la situer dans son contexte historique…..La pertinence de cette distinction tranchée paraît justifiée déjà par le fait qu’elle semble rendre compte de la réalité…. Exemple de la distinction :::: Ainsi, le savant et l’historien des sciences ne sont pas des personnages identiques, et leur travail peut être très différent. Quoi de commun entre la recherche d’un physicien dans son laboratoire et l’étude de l’historien qui se penche sur les textes dans lesquels le premier livre ses résultats et ses conjectures? Évidemment, l’un se confronte à la matière naturelle qu’il veut saisir dans sa réalité, tandis