Dissertation : FREUD Malaise dans la civilisation
Adler et Konrad Lorenz voient dans l’agressivité un instinct de survie exerçant un pouvoir structurant sur des territoires, les groupes, les pulsions même, soit un ensemble de comportements adaptatifs pouvant être contrôlés par une éthique, ce qui rapproche la notion de combativité des concepts de personnalité et de volonté, harmonieux dosage de libre inhibition et de libre initiative. Freud en revanche fait de cette fonction destructrice silencieuse, derrière la grande clameur de la vie, une composante de l’instinct de mort, dont le but est de séparer tout ce que le sexe a uni, de ramener à zéro toute tension pulsionnelle. Dans Malaise dans la civilisation, essai de 1929, contemporain de la montée des totalitarismes dans l’Europe de l’entre-deux-guerres, le psychanalyste viennois définit « l’hostilité primaire », que l’universalité de la pulsion agressive génère (« nous pouvons déceler en nous-mêmes » cette « tendance à l’agression » « dont nous supposons à bon droit l’existence chez autrui »), comme étant « le facteur principal de perturbation […] qui dresse les hommes les uns contre les autres ». Pessimiste, il voit même dans le désordre entropique[1], que l’irrépressible violence sexuelle, homicide, mais aussi symbolique et institutionnelle, donc économique et sociale, engendre, le principal facteur non seulement de « malaise dans la culture », l’individu civilisé souffrant tout à la fois de la frustration de ses pulsions et du hiatus entre les injonctions morales intériorisées et la violence effective des biais par quoi l’agressivité naturelle s’exprime, mais aussi d’anéantissement des efforts déployés par la civilisation pour hominiser l’homme en réfrénant, réprimant, et surtout sublimant ses pulsions agressives. La nature humaine est-elle donc si irrépressiblement violente, si foncièrement mauvaise qu’aucun effort de civilisation ne vienne à bout de la moraliser ou la culture peut-elle faire fond sur