methode pestel
Wajdi Mouawad affirme d’autre part que Jeanne n’est autre qu’Antigone 2. On est alors tenté de voir en Nawal « une nouvelle Jocaste » 3 livrée au fils maudit. Jeanne et Simon mis dans un seau devaient être noyés par une nuit d’hiver, mais l’eau était gelée. Ils sont alors confiés à Malak, « un paysan qui rentrait avec son troupeau » (p. 64). La présence de l’eau dans laquelle on veut perdre un nouveau-né et la figure du paysan ne sont pas sans rappeler une nouvelle fois le mythe d’Œdipe 4. L’exposition liée à un cours d’eau est un motif célèbre que l’on retrouve dans le récit de l’enfance de Moïse mais aussi dans la légende de Romulus et Rémus. Dans certaines versions, Réa, la mère des jumeaux aurait même été violée par le dieu Mars durant son sommeil 5, dimension qui pourra être rapprochée de la pièce.
Enfin, la gémellité est un autre aspect de cette résurgence mythique. Jeanne et Simon sont jumeaux comme le sont Romulus et Rémus. Cet écho est renforcé par le motif du loup récurrent dans la pièce mais aussi perceptible sur la première de couverture. Lino signe là une nouvelle illustration pour Wajdi Mouawad qui sera d’ailleurs utilisée comme affiche lors de la création de la pièce par l’auteur. On pense ici à la célèbre sculpture de la Louve romaine mais sous une forme inversée. Dans le dessin de Lino, un loup rouge (seul élément coloré) s’abreuve au sein d’une femme. La gémellité est effacée mais l’association fait sens. Charline Grand,