Organisation actuelle de l'etat unitaire décentralisé
Les principes du fédéralisme
On m’a demandé de venir vous exposer quels sont les principes essentiels du fédéralisme. Je crois que la meilleure façon de satisfaire à cette demande est de définir déjà ce à quoi s’oppose le plus fondamentalement le fédéralisme, en l’occurrence l’idéologie jacobine. Le jacobinisme correspond historiquement à la forme la plus extrême de l’idéologie de l’Etat moderne, c’est-à-dire de l’Etat-nation. C’est une idéologie qui vise à faire concorder de façon rigoureuse, à rendre homothétiques sur un même territoire, l’unité politique et l’unité culturelle, linguistique ou ethnique, grâce à l’action d’un pouvoir central détenteur d’une souveraineté exclusive, support visible de l’intérêt de tous et représentant unique de l’ensemble des citoyens. Cette volonté d’unité conduit à poser l’Etat et la nation, la citoyenneté et la nationalité, comme des synonymes. Bien que le terme de « jacobinisme » fasse évidemment allusion à l’action menée à l’époque de la Révolution française par le Club des Jacobins, la conception qui lui correspond est beaucoup plus ancienne. Elle apparaît en effet dès l’Ancien Régime, notamment avec l’émergence au XVIe siècle, chez Jean Bodin (1520-1596), d’une nouvelle théorie de la souveraineté. Alors qu’au Moyen Age, l’instance souveraine représentait seulement l’instance à la compétence la plus vaste, celle à laquelle revenait le pouvoir ultime de décision, la souveraineté se définit chez Jean Bodin comme la capacité pour le prince de se situer audessus de la loi positive (legibus solutus), d’en avoir le monopole et d’en disposer à sa guise. Cette conception s’inspire de l’absolutisme papal (et au-delà, du modèle de la toute-puissance divine), et va d’ailleurs de pair avec la diffusion du droit romain aux dépens du droit coutumier. Elle entraîne une nouvelle théorie de la représentation politique, qui va désormais agir comme facteur d’unité et d’homogénéité. Le prince, loin d’être un