-61. À mon retour de Zagreb, nous avons assisté au mariage d'une amie avec Caroline et ses filles. Caroline était témoin, elle portait un tailleur blanc sous le soleil dru. Et je me souviens comme j'avais envie d'elle, de sa peau, de son odeur. Nous avons fait l'amour entre la cérémonie et la soirée, dans la salle de bains. Nous étions vivants et elle était un peu jalouse. Elle avait cru que je traînais autour de la piscine pour observer une femme se baigner seins nus. J'essayais juste de passer un coup de téléphone au calme. Lorsque j'étais remonté, elle m'avait regardé avec méfiance, ses rayons bleus doutaient de moi ; il y avait eu comme un affrontement et puis nous avions cédé tous les deux au désir, sur le carrelage bleu et blanc. La lumière un peu grise, les murs marron, le frisson du rideau de douche, je me souviens de chacun des détails. Ces jours où tout s'était noué autour de moi. Nous venions de faire l'amour et je me sentais fort et gai. Ces semaines sont un moment heureux de ma vie, un moment plein. J'aimais Caroline. Et depuis quelques jours, nous essayions d'avoir un enfant. Le lendemain, nous devions rentrer à Paris. Nous avions fait l'amour encore, tard dans la nuit au retour de la fête, ivres. Puis, au matin, nous nous étions promenés avec les filles au milieu des herbes folles de la citadelle Vauban. Est-ce à ce moment-là que ça s'est produit, alors que, hagard, je marchais au milieu des insectes ? Le problème c'est le mystère, il vient tout corrompre. Je cherche la petite bête. Celle, un peu spéciale, qui m'aurait piqué ce jour-là. C'était le 29 mai 2005, le jour du référendum sur la Constitution européenne. Je devais couvrir la soirée électorale. J'étais journaliste, rédacteur en chef d'un site d'information. Tu vois, tu commences à en savoir un peu plus sur moi. Il suffit d'attendre. Je n'ai personne d'autre à qui parler. C'était il y a soixante et un jours si mes comptes sont bons. Autrement dit, il y a un siècle. La nuit électorale avait été