Peut On Tout Dire
L’homme a la faculté de communiquer avec quiconque partage son langage. Dire quelque chose, c’est l’exprimer, par la parole, dans un but de communication, et avant tout de signification : pour dire quelque chose à quelqu’un, il faut en effet que je donne un sens à mes paroles avant de pouvoir exprimer ce même sens, par le langage. Généralement, à partir du moment ou des mots connus par tous expriment des idées et même des sentiments, le langage paraît comme un outil prodigieux : on pourrait croire en la possibilité de « tout » dire, c’est-à-dire de traduire et transmettre à autrui toutes nos différentes réalités, émotions, opinions, idées... Ainsi perçu, tout semble exprimable. Et cependant, l’homme a-t-il cette capacité, par le langage, de tout dire, tout révéler ? Ne pourrait-il pas y avoir une part de ce « tout » qui échapperait au pouvoir de signification et par conséquent d’expression de l’homme ? Et, avant même de s’interroger sur la capacité de l’homme à tout exprimer, la question de « pouvoir tout dire » suppose également une autre approche : peut-on se permettre de tout dire à autrui ? Ne vaut-il pas mieux, parfois, omettre voire même cacher certaines vérités ? La morale nous autorise-t-elle à tout exprimer sans réserve ?
Dans nos sociétés démocratiques, nous avons certes pour principe le souci de transparence. Cet idéal, mettant chacun sur un pied d’égalité devant la vérité, reste cependant purement théorique. Si la transparence absolue régnait dans le monde, si le mensonge était banni de notre société, et si toutes réalités et pensées étaient dites, on peut imaginer qu’il en résulterait de nombreux conflits. Et pourtant, on peut également considérer que taire certaines idées et vérités de façon à éviter ou résoudre ces conflits est un procédé totalement hypocrite voire lâche, dissimulant les véritables opinions des individus d’une part et, d’autre part, refusant de faire face aux problèmes auxquels nous sommes