Peut-on traduire sans trahir?
On s’est toujours posé la question : « traduire c’est trahir? » Mais avant d’essayer à y répondre on doit se demander premièrement quelle est la signification du mot « traduire ». On aimerait donner cette première réponse rassurante : dire la même chose dans une autre langue. Si ce n'est que, d'abord, on a des difficultés à définir ce que signifie " dire la même chose ", et on ne le sait pas très bien pour les opérations du type paraphrase, définition, explication, reformulation, sans parler des substitutions synonymiques. Ensuite parce que, devant un texte à traduire, on ne sait pas ce que c’est que la chose. Enfin, dans certains cas, on en vient à douter de ce que signifie dire. On arrive pourtant finalement à comprendre que, tout en sachant qu'on ne dit jamais la même chose, on peut dire presque la même chose.
D’une langue à l’autre et à une même époque, les concepts ne se recouvrent jamais tout à fait, ce qui suffirait à faire de la traduction, à l’échelle de chaque mot, une tâche ardue. Tout le travail lexicologique du monde ne pourra prévenir le fait que le mot « brânză » en roumain n’est pas un équivalent exact, mais approximatif, du mot « fromage » en français (en France il y a plus de trois cents sortes de fromages). Il est pourtant le plus proche, et, dans la plupart des cas, sera approprié pour le traduire. En somme, les dictionnaires, bien qu’ils soient des outils indispensables, ne servent jamais que de source d’inspiration. A l’échelle de la phrase, le problème se complique encore. Car outre les équivalents individuels qu’il faut trouver pour chaque élément qui la compose, il s’agit de restituer son rythme général, son souffle, sa respiration, ses teintes et ses sonorités : son style. Donc, si traduire c’est donner à lire une œuvre dans une autre langue, il devient nécessaire de reproduire des écarts par rapport à une norme équivalente dans la langue cible ; de reproduire son style, non à l’identique s’entend,