Phécie terre d'utopie
I] Un lieu imaginaire et merveilleux
Le pays des Phéaciens est différent des autres lieux visités par Ulysse car il donne l'image d'un monde idéal et parfait. Il est situé « très loin des Hommes mange-pain » (VI, v.8), dans un pays nommé Schérie. C'est là que le registre du merveilleux idéal est le plus exploité : lieux et Hommes vivent dans une parfaite harmonie. La description du palais et du jardin met en relief cette union heureuse entre le travail des Hommes et la générosité de la nature. A l'image du pays de l'Eldorado où arrive le Candide de Voltaire, on peut interpréter la forte présence de l'or et de l'argent comme une volonté de décrire un lieu idéal où la peine et le travail sont inconnus. Comme dans l'Eden biblique, la nature est généreuse et semble donner ses fruits spontanément, sans qu'intervienne le labeur des Hommes, comme le suggèrent le rythme de la phrase et l'emploi du « on » dans les vers suivants : « en ce lieu déjà, on vendange, /en cet autre on foule les grappes » (VII, v.124-125). Homère parle d'une « merveilleuse vision » (VII, v.45), fruit des « dons éblouissant des dieux » (VII, v.132).
II] Une communauté idéaleDe même, l'organisation sociale et politique de la Phéacie semble parfaite. La constitution de l'Etat phéacien est régie par un principe d'équité : Nausithoos, le premier roi de Schérie, « fortifia leur ville, éleva des maisons, /distribua la terre et bâtit des temples aux dieux » (VI, v.9-10). Cette phrase présente les principes communautaires indispensables à tout groupe humain : habitat, terre, religion. Lors de l'accueil d'Ulysse, chacun est invité à se rendre aux festivités et s'y rend. Alcinoos règne non en monarque absolu, mais assisté de « conseillers et [de] gouverneurs » (VI, v.137). Les fruits de la nature ne sont pas réservés au roi mais sont partagés par tous : « C'est là que s'asseyaient les gouverneurs de Phéacie /pour boire et pour manger, ayant de tout