POEME FRANCAIS
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Le dormeur du Val est un poème d’Arthur Rimbaud publié en 1871.
Celui-ci est un poème construit en sonnet de vers composés d’alexandrin. Ce qui a attiré mon attention sur ce poème est tout d’abord la sorte d’enquête à laquelle Rimbaud convie son lecteur, en le menant sur des fausses pistes avant de lui assener une cruelle révélation. En effet les deux premières strophes nous font penser que le soldat n’est autre qu’un déserteur profitant de ce « trou de verdure » pour protéger sa fuite. Mais la menace se précise lorsque Rimbaud signale a son interlocuteur par trois fois que le soldat dort, au sens littéral, les pieds devant («les pieds dans les glaïeuls», v. 9), comme un cadavre. Enfin ses soupçon se précise lorsque l’auteur lui dévoile la révélation final en deux temps : le soldat ne respire plus, il porte une blessure mortelle. Par ailleurs ce qui m’a aussi plut dans ce poème est la façon par laquelle
Rimbaud fait allusion à la guerre. En effet il ne mentionne pas la guerre dans ce poème qui pourtant la dénonce : il préfère créer une figure de victime. C’est celle-ci qui suscite chez moi une forte empathie, et provoque émotion, ainsi qu’un sentiment de dégoût. De plus c’est le sens de l’image finale, qui m’oblige à une relecture immédiate du poème. La guerre apparaît comme une réalité cruelle