METHODES.

Sidi-Madani, jeudi 18 décembre 1947
Les systèmes philosophiques, les opinions les mieux fondées ont tojours inspiré à Ponge une sorte d’écoeurement, dégoût, par leur fragilité, leur extrême subjectivité. Pour lui, l’idée qu’on prétende les imposer est « insupportable », aussi absurdre que d’affirmer que les cheveux blonds bouclés sont plus vrais que les cheveux noirs lisses.
Il admet plus facilement qu’il est souhaitable de s’entendre sur les constatations, idées expérimentales, faits établis, et sur « quelques solides définitions. »
« Peut être était il naturel qu’en de telles dispositions (dégoût des idées, goût des définitions), je me consacre au recensement et à la définition d’abord des objets du monde extérieur, et parmi eux de ceux qui constituent l’univers familier des hommes de notre société, à notre époque. Pourquoi, m’objectera-t-on recommencer ce qui a été fait et établi dans les dictionnaires et encyclopédies ? » mais « pourquoi et comment se fait il qu’il existe plusieurs dictionnaires et encyclopédies en la même langue dans le même temps, et que leur définitions des même objets ne soient pas les mêmes ? surtout, comment se fait il qu’il semble s’y agir plutôt que de la définition des mots que de la définition des choses ? (…) D’où vient cette différence, cette marge inconcevable entre la définition d’un mot et la description de la chose que ce mot désigne ? D’où vient que les définitions des dictionnaires nous paraissent si lamentablement dénuées de concret, et les descriptions (des romans ou poèmes, par exemple) si incomplètes (ou trop particulières et détaillées au contraires) si arbitraires, si hasardeuses ? Ne pourrait on imaginer une sorte d’écrits (nouveaux) qui se situant à peu près entre les deux genres (définition et description), emprunteraient au premier son infaillibilité, son indubitabilité, sa brièveté aussi, au second son respect de l’aspect sensoriel des choses… »

samedi 21 décembre 1947
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les idées demandent,